lundi 27 juin 2011

"Les Tragiques", d'Euripide.



Le tragique désigne le caractère catastrophique et terrifiant d'un évènement ou d'une situation. La tragédie est un courrant littéraire classique apparu dans la Grèce antique qui plonge les protagonistes de l'histoire au coeur de situations extrêmes mettant à l'épreuve les sentiments humains jusqu'à leur limite ultime avec une intensité maximale. Euripide est l'auteur de pièces de théâtre tragiques incontournable, sinon le plus illustre, de l'Antiquité Grècque. Sur 92 de ses pièces seulement douze d'entre elles sont parvenues jusqu'à notre époque. "Les tragiques" est un recueil de pièce de théâtre qui en regroupe 10 au total : 1) Le Cyclope 2) Alceste 3) Médée 4) Hippolyte 5) Les héraclides 6) Andromaque 7) Hécube 8) La folie d'Héraclèse 9) Les suppliantes 10) Ion. Euripide né en 430 an JC, mort en 406 av JC est contemporain de Sophocle dont il est le cadet bien que mort peu avant lui. L'évènement le plus marquant de sa vie est la guerre du Péloponèse, durant laquelle il a vu Athènes, sa patrie natale, être envahie par les armées de Sparte. Dans "Les Tragiques" on retrouve tous les contes classiques de la Mythologie Grecque, avec parfois un ton révolté de l'auteur envers Sparte, pour sa fierté cruelle et militaire, contre Athène, toujours fidèle, pour sa part, à la justice des dieux pour se battre et emporter la victoire. Euripide expose merveilleusement dans ses mises en scènes le tragique de la condition humaine qui illustre la misère et la grandeur de l'homme. Le tragique de toute existence terrestre est d'être mortelle. Euripide dira dans "Andromaque" : "Tout homme doit mourrir, telle est la loi établie par les dieux". La misère de l'homme sur terre tient à ce qu'il ne puisse éviter la mort. Tous les aspects de cette misère humaine sont abordés dans "Les Tragiques" : en passant par la vieillesse, la maladie, et l'indigence matérielle, le destin ou la cruauté du sort, ainsi que les faiblesses et les travers secrets de notre âme. L'être humain est emporté par des forces aveugles en lui-même qui le poussent souvent à agir à l'encontre de sa conscience et sa raison. Les grecs disent être inspirés par les dieux, comme des jouets entre leurs mains capricieuses. C'est le cas de Médée, femme meurtrie et blessée à cause de la trahison de son mari Jason, qui pour se vanger  : accomplit des actes barbares et sacrilèges, d'une atrocité sans nom, par lesquels elles devient tout l'opposé d'elle-même (un monstre). Après l'empoisement de la princesse de Pherès et le meurtre de ses propres enfants, pour atteindre son mari, Médée, descendante du soleil, s'enfuit sur un char dans les airs tiré par des dragons. C'est aussi le cas d'Hermione, la fille de Ménélas, roi de Sparte, qui par jalousie a la faiblesse de tenter d'assassiner sa rivale, Adromaque, exclave capturée après la mise à sac de de Troie. Réalisant l'atrocité de son acte elle provoque sa propre malédiction en perdant le trône royal à cause de l'indignité de ses intentions. C'est encore le cas de Phèdre qui par son suicide accuse le vertueux Hippolyte, disciple la déesse Arthémis (rivale d'Aphrodite), et fils adoptif de Thésée, l'époux de celle-ci, de l'avoir courtisée. Mais le véritable mobile de ce suicide est en réalité le secret amour que Phèdre éprouvait pour le jeune innocent. La femme dans les tragédies d'Euripide est souvent représentée comme un être faible, victime de ses passions, déraisonnable, et irrésponsable de ses actes dont il faut se méfier. Euripide dira dans la bouche d'Hermione : " De mauvaises femmes venaient me voir. Elle m'ont perdue (...) Et moi, à écouter la voix de ces sirènes, bavardes, et rusées, avisées et méchantes, un vent de folie m'emporta (...) jamais, jamais, je ne saurais assez le dire, un mari de bon sens ne doit laisser chez lui une femme s'entourer d'autres femmes. Elles ne lui enseigneront rien que le mal". Pour trouver une explication aux tendancres inconscientes et souterraines de l'âme humaines les grecs incriminent les dieux en leur donnant le nom d'Immortels. Lorsque Phèdre tombe amoureuse d'Hippolyte elle n'est pas coupable. C'est Aphrodite la déesse de la séduction qui l'a pussée dans cette voie d'égarement jusqu'au suicide. Les dieux ont les mêmes qualités et défauts que les humains. Une bataille se livre dans le ciel et sur la terre pour la justice. Au dessus tous les dieux y compris Zeus sont soumis au destin. La grandeur de l'être humain face à cette tragique condition terrestre est de savoir comment affronter son propre destin en menant de front courageusement les situations tragiques qui se dressent sur son chemin. C'est dans l'épreuve et l'adversité qu'on voit si un homme possède de la vertu. C'est le cas de Démophon, roi d'Athènes, qui pour protéger les Héraclides, les enfants d'Hercule, n'hésite pas à leur accorder le droit d'asile, quitte à faire la guerre contre des dizaines de milliers d'hommes en armes de la cité d'Argos, qui réclament leur tête par vengeance contre Hercule. C'est le cas aussi de Macarie la fille ainée d'Hercule qui accepte de sacrifier sa vie pour pour satisfaire aux oracles qui avaient prédits en échange de ce sacrifice la victoire d'Athèhe sur les armées d'Argos.Lorsque l'être humain est suffisament éprouvé par sa condition terrestre les dieux viennent le récompenser pour ses mérites s'il en sort vainqueur. Ils lui donnent le repose de l'âme, la gloire immortelle ou la vie éternelle. C'est le cas de Ioalos, ancien écuyer d'Hercule, entouré par deux bouclier lumineux descendus du ciel, au milieu de la bataille, pour lui redonner la force de sa jeunesse passée pour mettre en déroute Eurysthée, le roi d'Argos. Ou encore Hippolyte à qui la déesse de la vertu arthémis accorde une gloire éternelle pour sa vertu et sa fidélité. Ou sinon Pélée, humain objet d'amour pour la déesse Thétis qui lui offre à lui et toute sa psotérité la vie éternelle. Un ouvrage à lire absolument !!!

vendredi 3 juin 2011

"Le Prince" de Machiavel.


"(...) Parce que des hommes, on peut généralement dire ceci, qu'ils sont ingrats, inconstants, simulateurs, et dissimulateurs, fuyards devant les périls, avides de gains ; et tandis que tu fais leur bien, ils sont tout à toi, ils t'offrent le sang, les biens, la vie et les fils, comme j'ai dit ci-dessus, quand le besoin est éloigné ; mais quand il s'approche de toi [le Prince], ils se détournent ..."

"Le Prince" de Machiavel fut écrit en 1513. C'est un manuel au service du Souverain pour garder le pouvoir, parfois aussi au détriment du peuple. Pour les uns Machiavel est solaire et clairvoyant, pour les autres diabolique et courtisan. Le contexte dans lequel cette œuvre a été écrite touche simultanément à la vie de l'auteur et à la crise politique qui traverse les petits royaumes d'Italie. Premièrement, Machiavel fut chassé de la chancellerie de Florence ; après avoir été accusé de conjuration contre le cardinal Giuliano de Medecis, il fut emprisonné, torturé, puis libéré et placé en résidence surveillée dans sa petite propriété privée. C'est dans ce contexte personnel que Machiavel écrivit "Le Prince". Secondement l'Italie était confrontée d'une part à l'instabilité de ses institutions politiques et d'autre part à des invasions étrangères barbares et puissantes. Dans ce contexte de crise "Le Prince", texte destiné au Prince Laurent de Medicis, est un appel au redressement des royaumes d'Italie et à la guerre contre les invasions étrangères. L'originalité de cette œuvre est d'aborder la question politique en dehors de toute considération morale. Le souci de Machiavel est d'expliquer de manière réaliste et objective les mécanismes du pouvoir politique en faisant prévaloir la raison d' Etat sur toute autre considération éthique. Dans cette optique Machiavel est considéré comme l'un des pères fondateur de la Science Politique dont l'étude méthodologique appréhende le politique comme un fait de nature scientifique. La question centrale de cette œuvre est de savoir qu'est-ce qu'un "principat" (une royauté ou Cité-Etat), quelles en sont les différentes espèces, comment s'acquièrent-ils, et comment ils se maintiennent ? Le conseil d'importance majeure que Machiavel donne au Prince est celui de l'indépendance. Pour cela il faut créer une armée indépendante pour défendre la cité. Le Prince doit appuyer sa force militaire sur une armée du peuple, plutôt que sur une armée de mercenaires, qui se battent non pour l'amour de la patrie, mais en échange d'un salaire. Le peuple est la composante essentielle sur laquelle se fonde le pouvoir politique du Prince. Pour cela il doit susciter de l'amitié et non de la défiance ou de la haine. Inversement le Prince doit aussi être proche des grands du royaume parce qu'ils peuvent conspirer contre lui et provoquer sa ruine. Le pouvoir royal doit trouver un juste équilibre entre le peuple et les grands du royaume, car le premier a pour lui le nombre et la force physique, tandis que les seconds voient plus loin et sont plus rusés que le peuple. Les grands du royaume ont pour désir de commander, diriger et opprimer. Tandis que le peuple a pour désir de ne pas être commandé, dirigé et opprimé, et si possible il souhaite prendre part lui aussi au pouvoir à travers les décisions et les délibérations politiques de la Cité. Machiavel emploie un terme pour désigner ces désirs ou passions contradictoires : celui d'humeurs politiques. Il est illusoire de vouloir réconcilier les différentes humeurs politiques du peuple et des grands de la Cité, parce qu'elles sont antagonistes et radicalement opposées. Le mélange des humeurs dans la Cité peut mener "le principat" soit à la coexistence pacifique soit à la désunion sanglante. Le Prince doit se montrer attentif aux aspects très affectifs et passionnels de la politique en suscité l'amitié de ses sujets plutôt que la haine. Cependant la nature humaine étant capricieuse et changeante le Prince peut provoquer sa ruine en cherchant à faire le bien uniquement par le biais d'actions pitoyable et pathétiques. Pour ne pas susciter le mépris de ses sujets le Prince doit savoir aussi susciter de la criante en se montrant parfois monstrueux et sanguinaire. Parce qu'ils sont ingrats, perfides et lâches, les hommes se montreront plus craintifs et obéissants si le Prince sait en temps voulu user d'inhumanité et de cruauté. Le portrait du Prince que brosse Machiavel est donc une image ambivalente de bienveillance et de cruauté pouvant se montrer tout à la fois humaine et inhumaine suivant la nécessité des circonstances. Le meilleurs conseils à donner au Prince est de toujours susciter la crainte, mais jamais la haine. Pour cela le Prince doit se mettre en scène et véhiculer une image écran ayant l'apparence de la vérité, mais derrière les apparence factice comme un décor en carton pâte. Derrière l'image du Prince se trouve une réalité insondable et plus sombre qui est celle de la raison d'Etat, placé au delà des traditionnelles considérations morales. Le Prince doit faire le bien pour gouverner, du moins en apparence, mais il doit aussi savoir entrer dans le mal et s'en retirer dès que la situation l'oblige. Pour Machiavel le temps terrestre est corrélé au temps céleste. C'est à dire qu'il existe une corrélation entre les évènements qui se déroulent sur terre et les signes qui apparaissent dans le ciel. Cependant les hommes ne parviennent pas toujours à les comprendre. Une action pleine d'ardeur et d'énergie aura plus d'efficacité qu'une action lâche et paresseuse. Pour cela le Prince doit faire preuve de la plus haute vertu. En cela le Prince doit imiter les hommes de grande vertus tels que Thésée le fondateur de la Cité d'Athène, Romulus le créateur de la Cité romaine ou Moïse celui qui a libéré le peuple juif de la captivité par l'intermédiaire de Dieu. Le Prince selon Machiavel doit être fort comme le lion et rusé comme le renard.